dimanche 12 juin 2016

Notre pays s'affiche à la fois comme une victime... #EURO2016

Notre pays s'affiche à la fois comme une victime, nation maudite qui est la cible des terroristes, le carrefour de diverses violences, et comme un Etat en déréliction. C'est ainsi que la France sera jugée.
Il en est des hooligans surgis avec l'Euro comme des casseurs greffés sur les manifestations anti-loi Travail: les forces de l'ordre ne savent ni les canaliser ni les neutraliser. D'abord, parce qu'ils ne sont pas identifiés et arrêtés en amont: alors que la plupart de ces énergumènes ont déjà été impliqués dans des incidents, le fichage et l'échange de renseignements sont d'évidence inefficaces. Est-ce la police française qui n'utilise pas assez les bases de données internationales et coopère mal? Est-ce l'Europe qui est défaillante et oppose plus de barrières aux fichiers que de frontières aux individus dangereux? Sans doute un peu les deux...

Ensuite, parce que les méthodes employées par la police sur le "champ de bataille" sont obsolètes: casseurs et voyous opposent leur mobilité aux mouvements lents des "robocops" alourdis, qui n'osent pas évoluer hors du collectif, puisqu'ils se font tabasser quand ils s'isolent. La police bascule dans le "rien ou tout", et passe de l'alignement passif, sous les jets de projectiles, aux charges véhémentes en aspergeant tous azimuts et en faisant pleuvoir les coups.

Techniquement inadaptées, les forces de l'ordre sont psychologiquement en retard: la connaissance et l'infiltration des groupes de supporters, comme des activistes d'extrême gauche, permet de désamorcer ou de prévenir. Collaborer avec les organisateurs de manifestations syndicales ou sportives ne doit pas consister simplement en un échange de bons procédés, cela doit prendre la forme d'un plan anti-violences. Quelques dizaines, quelques centaines d'individus sont dans le collimateur: ne pas savoir les neutraliser signe l'obsolescence des techniques de préservation de l'ordre public. Depuis plusieurs mois, la police semble découvrir ce qui survient: l'effet de surprise est du côté des malfaisants.

La France, creuset du désordre social et carrefour de violences
Enfin, la police semble politiquement abandonnée. Derrière l'épuisement des effectifs après des mois de surveillance accrue liée aux attentats, se cache la fragilité des stratégies du pouvoir. Sur le terrain, les consignes ne sont pas claires, issues d'une hiérarchie qui ne veut ni casse ni bavure et finit par avoir les deux. En amont, la notion même "d'ordre" a perdu de son sens: qu'est-ce qu'un "état d'urgence" où les manifestations sont autorisées, les happenings permanents de Nuit Debout tolérés et la vente d'alcool, ainsi que les rassemblements hors des stades, absolument pas limités pendant l'Euro?

La gauche est dépassée par la contradiction urgence/liberté, la droite en profite mais n'a aucun plan B crédible à proposer, si ce n'est tout interdire.

Certes, le syndicalisme est malade, qui n'arrive pas à purger ses mobilisations des parasites ultra-violents; certes, le football n'est pas guéri, qui voit se reformer régulièrement des hordes de hooligans, nourris aux biberons racistes des divers populismes nationaux; mais le plus inquiétant est l'affaiblissement de la puissance publique, pusillanime en ses décisions politiques, dépassée en ses techniques et anémiée en ses moyens humains.

Il en est des bris de verre sur le Vieux-Port de Marseille comme des poubelles amoncelées sur les trottoirs de Paris: l'image de la France est atteinte.

Notre pays s'affiche à la fois comme une victime, nation maudite qui est la cible des terroristes, le creuset du désordre social et le carrefour de diverses violences, et comme un Etat en déréliction, plus à même de lutter contre ces fléaux. C'est ainsi que la France sera jugée par le Comité international olympique pour l'attribution des Jeux de 2024; c'est ainsi qu'elle sera considérée par le monde lors de la présidentielle 2017; c'est ainsi qu'elle sera perçue quand elle voudra parler de relance de l'Europe ou d'un nouvel ordre mondial.

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Pierre Erol GIRAUDY

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